
Voilà, vous avez sous les yeux le résultat. Cette minette est affolée et elle a peur pour sa vie. Elle appelle au secours. Elle miaule, car c’est la seule chose qu’elle puisse faire pour exprimer sa peur et son désarroi.
Elle est sortie de sa situation précaire, mais elle n’en sait rien, donc elle stresse.
Vous voulez savoir ce qu’il lui est arrivé ? Enfin, je devrais dire : ce qu’il LEUR est arrivé, car elle n’était pas toute seule, figurez-vous…
Reprenons depuis le début : un couple avec une enfant d’une dizaine d’années avait des chats. Huit chats au moment où nous avons eu connaissance du problème, à savoir l’expulsion du logement, le départ imminent de la famille vers d’autres cieux, et donc, pour y venir, l’abandon pur et simple des minets vivant dans ce foyer.
Une personne de l’équipe de nourrisseurs-protecteurs du quartier est informée et alerte Marie-Thérèse, qui s’empare de l’affaire. Pour les humains, on ne peut rien faire, car ils ont décidé de partir. Ils savent où et comment, et cela ne les inquiète en rien. Par contre, les chats, hein, ben on s’en va, alors faudrait une solution.
– Deux chatons sont donnés directement par la famille à un monsieur du quartier dont, bien sûr, personne n’a les coordonnées ni l’adresse. De fait, ils disparaissent dans la nature d’emblée. Mon avis est qu’on ne va pas tarder à les retrouver dans la rue dans quatre mois, s’ils ne sont pas passés dans l’estomac d’un serpent.
– Une minette pleine est opérée illico, histoire de calmer le jeu tout de suite, et elle est confiée en famille d’accueil. C’est celle que vous voyez sur cette photo. Elle est à l’adoption.
– Une autre minette en voie de famille est également stérilisée, mais elle décédera des suites de l’opération. Nous vous rappelons que le risque zéro n’existe pas en matière d’intervention chirurgicale et que c’est aussi valable pour nous. Et c’est là que Marie-Thérèse et moi avons mis le doigt sur une réalité qui ne nous avait pas effleurées dans le stress du sauvetage. Nous avons été mises en alerte par le vétérinaire : ces animaux sont mal nourris et ils sont maigres, donc faibles. Cela tombait bien, on se demandait s’il était possible que le tableau soit encore plus noir.
– Une minette totalement affolée s’est sauvée en soulevant le volet roulant de la chambre de quarantaine. On la capturera plus tard dès qu’elle se sera remise de son stress.
– Une minette tigrée s’est cachée derrière une commode des jours durant, pendant la quarantaine, refusant de manger et se terrant littéralement. Elle n’a accepté de sortir de sa cachette qu’après avoir été approchée et touchée avec force précautions. Depuis, elle s’est détendue, mais elle a besoin d’une famille d’accueil. On l’a nommée Doucette.
– Le grand chat roux a lui aussi été traumatisé par son changement de lieu de vie, et il s’est fait une cachette sous le lit, refusant de manger tant qu’on ne lui aurait pas expliqué de quoi il en retournait. Ce n’est pas faute de l’avoir fait, car je connais Marie-Thérèse et elle est comme nous tous : elle parle aux chats !
Surnommé Gaston, ce chat roux s’avère être un timide de convenance, car il a juste besoin qu’on le papouille un peu pour accepter d’aller plus loin dans les ronrons, câlins et autres minauderies félines.
– Et savez-vous ce qu’il est arrivé au dernier chat, celui de quatre mois environ ? Eh bien, ils l’ont emmené, bien sûr ! Par train et dans sa boîte de transport, pour continuer à vivre une vie de galère. Après tout, il n’y a pas de raison… Je ne donne pas cher de sa peau, vous non plus sans doute.
Nous aurions bien aimé avoir les coordonnées de ces personnes, histoire de les suivre un peu, de mettre en alerte les associations de protection animale de Narbonne, où elles ont dit qu’elles iraient. Mais cela aurait été trop demander et dans le quartier, on n’aime pas trop les questions. Sauf que nous savons qu’ils feront pareil partout où ils passeront et plutôt que de les sanctionner, nous aurions aimé leur faire comprendre l’intérêt de faire stériliser les chats et les chattes vivant sous leur toit.
Il existe plein de solutions, y compris pour éviter l’expulsion, voir les assistantes sociales et le DAL (Droit au logement). Et pour les animaux, si on n’a pas ou peu de moyens, on peut faire appel à IFAW, à la fondation Brigitte Bardot, à la SPA France, 30 Millions d’amis… Mais les laisser proliférer ainsi, sans avoir de quoi les nourrir ou les soigner, c’est vraiment ce qui traumatise des équipes complètes de bénévoles et des chats, des chattes qui n’y sont pour rien, qui subissent en silence.
Nous demandons la stérilisation obligatoire aux gouvernements qui se succèdent et un jour, nous serons entendus. Mais d’ici là, nous avons besoin de bonnes volontés pour aider ces chats : que ce soit en diffusant les informations sur l’intérêt et l’importance de la stérilisation, en accueillant chez soi un minet, en faisant un don, en participant à nos événements, en transportant ou capturant des chats… Il y a un éventail très large de possibilités et chacun fait à sa mesure. Mais n’oubliez pas que si vous ne faites rien, il ne se passera rien. Rien de bon, en tout cas. Et cette minette aura eu raison de hurler, car cela aura été sa seule ressource.
Hélène B. Juillet 2017