
C’est l’histoire d’un chat libre, errant, solitaire et qui aimait l’idée de rester libre.
Dans la rue, jeune, c’était un caïd qui faisait régner la loi. Enfin, la sienne de préférence… Il mettait des coups de pattes et de dents à n’importe quel félin en âge de se battre, c’est à dire dès 3 mois. Il fit valoir ses droits de despote au point que les humains alentour s’en inquiétèrent, tant pour sa santé que celle de leurs chats domestiques. Ils le firent capturer et stériliser.
Depuis lors, le minet avait rangé les armes, conclu des pactes de non-agression avec les félins alentour et continuait sa vie de chat errant dans le froid et les intempéries. Nourri tout de même, mais sans confort de vie aucun.
Ses frasques de jeunesse ne tardèrent pas à faire valoir leurs droits et ce minet vit son immunité peu à peu baisser. Il était séropositif… Le coryza s’installa et il sortit des perles de sang de ses yeux.
C’est là qu’il fut repéré par un étudiant, qui le caressait en sortant des cours et qui rechercha de l’aide pour le chat.
Vous savez, aider un minet est vraiment à la portée de tout le monde. Le seul moyen d’en être sûr est d’essayer, au moins essayer. L’énergie dépensée pour la capture du minet (trois minutes, car le matou aime les humains), pour le conduire chez un vétérinaire et l’amener chez soi pour lui assurer des soins au chaud, cela aurait demandé quoi ? Une heure ?
Ce qui aurait demandé une heure à cet étudiant s’est transformé en une avalanche d’appels auprès d’une bénévole, des envois de SMS en pagaille, à la limite de l’irrespect. « Aidez ce pauvre chat ! » Telle était l’injonction culpabilisatrice, les auteurs de ces messages ne tenant compte de rien d’autre et surtout pas du fait que la bénévole a, elle aussi, une vie bien remplie de chats, justement. Mais elle a aussi une famille, un employeur, un plombier qui doit passer, etc. Une vie comme nous en avons tous, ou presque.
Vous imaginez toute cette énergie perdue ? Ce temps passé à faire des photos, envoyer des SMS, faire appeler les uns, les autres pour faire pression, et tout cela pour quoi ?
Absolument rien ! Parce que le chat retourne dans la rue, tout simplement ! Aller plus loin que de donner l’alerte n’est pas possible, voilà !
Évidemment, nous avons tous des excuses, surtout quand on n’a pas envie de faire ni de bouger soi-même, tout à son idée que l’autre peut bien le faire, lui (ou elle), puisqu’il adhère à une association. C’est un rapport de force, un bras de fer tout à fait malhonnête, je le dis clairement.
Certains vont même jusqu’aux injures, menaces, etc. Demandez aux bénévoles qui reçoivent les appels, elles vous raconteront.
Elles vous diront toutes les stratégies mises en œuvre pour être débarrassé du problème (qui est, au passage, un être vivant) ; elle vous diront les reproches à peine voilés si toutefois nous ne pouvons pas « virer ces sales chats » de leur jardin…
N’oubliez pas que vous avez vous aussi le pouvoir de changer les choses : mettre à l’abri un chat blessé dans votre salle de bain plutôt que de le laisser seul dehors avec le froid de novembre, c’est facile !
Oui, votre chat fera peut-être la tête, mais ils ne seront pas en contact direct si vous êtes sérieux et dans le respect des consignes. Qui ne le serait pas pour préserver l’équilibre de son foyer ?
Les bénévoles de l’association sont des personnes comme vous : elles ont ouvert leur porte un jour à un minet et elles se sont rendu compte qu’en fait, beaucoup de choses sont possibles et qu’avec peu, on peut faire une grande différence dans la vie d’un chat.
En fait, cela change absolument tout dans sa vie.
Donc, avant de déployer des trésors d’énergie à appeler, rappeler, envoyer moult SMS, mails et compagnie, posez-vous la question : que puis-je faire concrètement ? Sincèrement ? Honnêtement et dans le respect de la vie féline qui est devant moi, dans la rue, en détresse ?
Hélène Bourdon – novembre 2019