6 février 2015 : Babeth s’en va-t-en guerre, vous connaissez ? C’est un film avec Brigitte Bardot ! Bon ok, il date un peu : 1959. L’héroïne d’aujourd’hui a juste 7 ans, mais 7 ans de galère. Jetée à la rue dès ses 6 mois, elle subit régulièrement la rudesse des conditions climatiques, mais aussi la maltraitance gratuite et régulière des humains qui la croisent.
Cela fait huit ans que je suis dans l’association et j’ai toujours entendu parler de cette minette. Pour différentes raisons, j’ai toujours repoussé le moment de la soustraire à la rue. Bien souvent, on pense que quelqu’un va avoir pitié… J’ai tant et tant d’appels pour le même chat maltraité… Impossible que personne ne réagisse !
Nous l’avons fait stériliser et nous lui avons donc offert un peu de confort. Car être mère chatte à la rue, c’est la descente aux enfers. Je l’ai proposée tant de fois à ceux qui me demandaient de la sortir de leur rue, en expliquant que nous avions juste besoin d’un toit pour la mettre à l’adoption. Mais rien. Le plus terrible pour ces personnes qui appellent à l’aide « pour l’animal », ce n’est pas tant la misère du chat, c’est la vue inconfortable de ce reproche vivant devant eux, tous les jours, qu’ils aimeraient voir disparaitre.
Ce n’est pas heureusement le cas de tous les appels.
Cet été, j’ai eu très peur pour elle, j’ai essayé de la placer, mais nous n’avions plus de place, comme en ce moment… Elle a échappé à la mort par miracle, car le reste de ses compagnons ont été « éliminés ».
L’hiver arrive et avec lui, de nouveaux appels qui font mal au cœur. Comment supporter encore une fois de dire non à cette minette ? J’ai eu beau supplier de rentrer la chatte quelques jours pour nous donner le temps de trouver une solution … rien.
Un appel sur Facebook a été partagé, mais rien… aucune proposition.
Alors, nous nous sommes débrouillés, nous avons poussé les murs comme dit Isa et j’ai demandé à Pascale si elle pouvait prendre Babeth. Je ne peux pas nommer ici toutes les familles d’accueil qui ont pris dans l’urgence un chat naufragé de la vie ces derniers jours. Le froid est tel que les chats errants meurent seuls et abandonnés, même par ceux qui essayent de les aider, et nous avons mal. Mais nous ne pouvons pas tous les accueillir et chaque jour est un crève-cœur quand nous avons dit NON, pas de place pour lui ou elle.
C’est insupportable ! Alors, le seul moyen que nous avons de vous faire vivre cela, c’est de vous raconter, de partager, afin que vous puissiez témoigner à votre tour.
Nous n’allons pas vous montrer la maltraitance quotidienne que subissent ces petits êtres faibles, mais nous allons vous montrer comment Babeth, une fois en sécurité, réagit. La douceur de la voix de son humain protecteur (cela change des cris vociférés par des humains destructeurs), la gamelle pleine, la chaleur, les caresses et mots doux que la famille d’accueil lui prodigue… Babeth se pose, s’abandonne. En effet, à peine sortie de chez le vétérinaire pour soin et identification, Babeth offre un gros câlin qui en dit long à Joël.
Qui n’a jamais tenu dans ses bras, contre son cœur, un chat de la rue ne se doute pas de ce qu’il perd. Pouvoir toucher de près l’esprit d’un animal, être si près que les deux esprits se rejoignent et communiquent, sans un mot…
Inutile de vous en dire plus. Regardez bien les photos : l’amour et la paix qui se dégagent de Babeth, les griffes qui se font douceur, la main de Joël protectrice et rassurante.
C’est cela, arracher un animal de la rue ; c’est cela, donner enfin un peu de répit aux collègues qui pourront fermer les yeux cette nuit sans remords ou presque… car il y a encore tant à faire !
Une chose est sûre, c’est que nous finirons bien par faire changer les choses, nous nous y employons de toutes nos forces, nous sommes de plus en plus nombreux à avancer dans la même direction. Vous aussi, faites passer le message de compassion et d’attention pour tout être vivant !
Babeth a été adoptée le 20 février 2015. Merci à tous ceux qui se sont unis pour lui donner une autre chance !
7 avril 2015 : Babeth est morte ce matin. Nous avons soutenu l’adoptante, car Babeth avait besoin de soins, mais malgré tous nos efforts, la maladie a été la plus puissante. Un chat de rue collectionne les maux divers et destructeurs, et Babeth avait connu la maltraitance humaine.
J’aurai toujours le regret de ne pas avoir agi assez vite pour elle. Par manque de place, je l’ai sacrifiée pour un plus jeune, un plus en danger, comme si sa vie était de moindre importance vu qu’elle avait déjà 7 ans. Je ne cherche pas d’excuses, je constate que nos choix sont vraiment difficiles et restent subjectifs.
Merci à Pascale, Joël et à la famille adoptante pour lui avoir donné de l’amour pendant deux petits mois sur sept ans de vie sur terre.
Nous avons tous vraiment le cœur gros.